{"id":410147,"date":"2023-09-21T08:49:11","date_gmt":"2023-09-21T08:49:11","guid":{"rendered":"https:\/\/clbritmondiale.com\/?p=410147"},"modified":"2023-09-21T08:49:11","modified_gmt":"2023-09-21T08:49:11","slug":"recit-charlotte-gainsbourg-la-visite-de-la-maison-gainsbourg","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/clbritmondiale.com\/celebrites\/recit-charlotte-gainsbourg-la-visite-de-la-maison-gainsbourg\/","title":{"rendered":"RECIT \u2013 Charlotte Gainsbourg\u00a0: la visite de la Maison Gainsbourg"},"content":{"rendered":"

La Maison Gainsbourg, o\u00f9 v\u00e9cut l\u2019artiste, vient d\u2019ouvrir ses portes rue de Verneuil dans le 7e arrondissement de Paris. Nous avons pu la visiter en avant-premi\u00e8re. Un moment d\u2019\u00e9motion, guid\u00e9 par la voix de sa fille Charlotte.<\/p>\n

D’abord, il y a le bruit des clefs dans la serrure de la porte, \u00e0 droite, juste apr\u00e8s la grille visible depuis la rue. Hautement symbolique. Deux jours avant sa mort, le 2 mars 1991, Serge Gainsbourg avait not\u00e9 dans son petit carnet : \u00ab\u00a0Donner les clefs \u00e0 Charlotte<\/strong><\/em>\u00ab\u00a0. Trente-deux ans plus tard, Charlotte Gainsbourg, 52 ans, en a fait bon usage. Elle a tout gard\u00e9, prot\u00e9g\u00e9, pr\u00e9serv\u00e9 de cette maison. Une b\u00e2tisse de 130 m\u00e8tres carr\u00e9s, construite sur deux \u00e9tages, aux pi\u00e8ces \u00e9troites et aux plafonds bas, d\u00e9nich\u00e9e par Joseph, le p\u00e8re du chanteur. C\u2019est Charlotte, enfin plut\u00f4t sa voix, diffus\u00e9e dans un casque audio \u00e0 g\u00e9olocalisation fourni \u00e0 l\u2019entr\u00e9e, qui nous accueille au seuil de la maison. On se sent pris d\u2019un vertige. Les d\u00e9cennies d\u00e9filent. 13 septembre 2023, 2020, 2010, 2000, 1990, 1980, fin des ann\u00e9es 60\u2026 Juste derri\u00e8re la porte, sans vestibule, sans trait d\u2019union pour s\u2019habituer \u00e0 l\u2019id\u00e9e, on se retrouve de plain-pied dans le living-room de \u00ab\u00a0l\u2019homme \u00e0 la t\u00eate de chou<\/em>\u00ab\u00a0. On est saisi par la solennit\u00e9 de l\u2019instant, par le privil\u00e8ge de d\u00e9couvrir cette pi\u00e8ce o\u00f9 pieds nus, dans son jean \u00e9lim\u00e9 aux chevilles, il accueillait amis et artistes, et, la nuit, des chauffeurs de taxi et des policiers. On n\u2019a pas assez de cinq sens pour capter tout ce qui se joue devant <\/strong>nous. Il flotte dans l\u2019air une odeur bois\u00e9e, miell\u00e9e. D\u00e9sorient\u00e9, on reprend pied au son du r\u00e9cit de Charlotte Gainsbourg. Ses souvenirs de petite fille \u00e9veillent un \u00e0 un les objets qui d\u00e9corent cette pi\u00e8ce aux faux-airs de caverne d\u2019Ali Baba.<\/p>\n

Un demi-queue, un piano droit sur lequel elle a appris \u00e0 jouer, le t\u00e9l\u00e9phone avec ses touches pr\u00e9enregistr\u00e9es : Lulu 1, Lulu 2 (le dernier fils de Serge), des m\u00e9gots de Gitane dans un cendrier, et le bien le plus pr\u00e9cieux de tout ce qu\u2019elle poss\u00e8de de son p\u00e8re, son attach\u00e9-case. Cette mallette, qui \u00e9tait remplie de billets de 500 francs, est pos\u00e9e \u00e0 c\u00f4t\u00e9 du canap\u00e9 dont l\u2019assise fatigu\u00e9e a gard\u00e9 en m\u00e9moire la place o\u00f9 l\u2019artiste avait l\u2019habitude de s\u2019asseoir. Puis la voix de Charlotte nous invite \u00e0 quitter la pi\u00e8ce\u2026 <\/strong>Au fond \u00e0 gauche, il y a la cuisine. Petite, dans son jus, les pots d\u2019\u00e9pices sur les \u00e9tag\u00e8res, les grands crus conserv\u00e9s par le ma\u00eetre des lieux en souvenirs d\u2019\u00e9v\u00e9nements importants, le r\u00e9frig\u00e9rateur avec sa porte transparente, qui devait toujours rester parfaitement rang\u00e9. Charlotte nous y raconte les t\u00eate-\u00e0-t\u00eate silencieux avec son p\u00e8re, le poste de t\u00e9l\u00e9vision toujours allum\u00e9, les repas pris avec Kate devant les prestations t\u00e9l\u00e9vis\u00e9es de Serge. Au fond de la pi\u00e8ce, une porte permettait aux filles d\u2019acc\u00e9der \u00e0 leur chambre<\/strong>. Une vol\u00e9e de marches et nous voil\u00e0 au premier \u00e9tage, exigu aussi, aux murs drap\u00e9s de noir. Un couloir en L dessert un placard vitr\u00e9 abritant les v\u00eatements de Gainsbourg.<\/p>\n

Tr\u00e8s peu de pi\u00e8ces, finalement. \u00ab\u00a0Papa n\u2019avait que deux chemises, quatre tee-shirts, deux jeans. C\u2019est tout !\u00a0\u00bb<\/strong><\/em> Ici, la salle de bains en boiseries avec son lustre \u00e0 pampilles, qu\u2019avec les ann\u00e9es, la petite Charlotte parvenait \u00e0 atteindre ; les produits de beaut\u00e9 et autres flacons de parfum d\u00e9pos\u00e9s \u00e7a et l\u00e0 ; le bidet dissimul\u00e9 derri\u00e8re la porte o\u00f9 Serge Gainsbourg faisait ses ablutions et une grande baignoire, terrain de jeux de Jane et de ses filles. Magie de la technologie, la bande-son originale cr\u00e9\u00e9e par Soundwalk Collective, compos\u00e9e d\u2019un fonds d\u2019archives sonores in\u00e9dites, diffuse leurs rires dans notre casque. On a presque l\u2019impression de sentir les effluves du talc italien avec lequel la Britannique Jane Birkin poudrait ses petites Kate et Charlotte. Autre ambiance, plus \u00e9trange, en face\u00a0: la chambre des poup\u00e9es, ainsi nomm\u00e9e apr\u00e8s que <\/strong>Jane Birkin eut claqu\u00e9 la porte<\/strong> \u00e0 l\u2019issue de douze ans d\u2019amour fou<\/strong>. Avant c\u2019\u00e9tait son endroit, o\u00f9 elle entreposait son univers joyeux et d\u00e9sordonn\u00e9. Aujourd\u2019hui, les poup\u00e9es collectionn\u00e9es par le musicien y sont align\u00e9es\u2026 Charlotte et son p\u00e8re, qui n\u2019avaient pas les m\u00eames horaires \u2013 Serge Gainsbourg ayant pour habitude de se lever tard \u2013, avaient instaur\u00e9 une r\u00e8gle pour jouer malgr\u00e9 tout ensemble aux jeux Atari. L\u2019un continuait la partie tandis que l\u2019autre dormait. Au bout du couloir, la chambre, chasse gard\u00e9e des parents. Seule Kate osait s\u2019y aventurer, la nuit, pour les pr\u00e9venir quand Charlotte, petite, faisait des cauchemars. C\u2019est l\u00e0 que Serge Gainsbourg s\u2019est \u00e9teint, de son c\u00f4t\u00e9 du lit<\/strong>. Charlotte se souvient dans nos \u00e9couteurs du tourbillon qui s\u2019ensuivra. De Kate, Bambou, leur belle-m\u00e8re, et elle couch\u00e9es aupr\u00e8s de la d\u00e9pouille tandis que leur parvenait, depuis la rue, la chanson Je suis venu te dire que je m\u2019en vais<\/em> entonn\u00e9e par des fans \u00e9plor\u00e9s. Des mots \u00e9nonc\u00e9s avec simplicit\u00e9, retenue, la m\u00e9moire toujours vive d\u2019une toute jeune fille orpheline de p\u00e8re, qui vous arrachent des larmes.<\/p>\n

A l\u2019autre bout du couloir en L, le bureau o\u00f9 Serge Gainsbourg \u00e9crivait, sa machine \u00e9lectrique, sa biblioth\u00e8que tr\u00e8s \u00e9tudi\u00e9e. Un puits de culture o\u00f9 Charlotte venait consolider la base de son \u00e9rudition. La visite s\u2019ach\u00e8ve. Impossible de se souvenir de ses derniers mots<\/strong> tant on est submerg\u00e9 d\u2019\u00e9motions, percut\u00e9 par la puissance du t\u00e9moignage. De l\u2019autre c\u00f4t\u00e9 de la rue, au 14, la vie et l\u2019\u0153uvre de Serge Gainsbourg se racontent autrement, dans un lieu hybride, \u00e0 la fois mus\u00e9e, piano-bar et biblioth\u00e8que-librairie-disquaire, dont les codes visuels font \u00e9cho avec la maison historique. On y d\u00e9couvre notamment, au rez-de-chauss\u00e9e, la collection permanente compos\u00e9e de 450 objets, bijoux et documents originaux sur les 25 000 que rec\u00e8le la Maison Gainsbourg. Ces pi\u00e8ces expos\u00e9es chronologiquement de la naissance \u00e0 la disparition de l\u2019artiste sont doubl\u00e9es d\u2019un parcours vid\u00e9o o\u00f9, sur huit \u00e9crans, on peut r\u00e9\u00e9couter et revoir l\u2019auteur du Poin\u00e7onneur des Lilas \u00e0 travers des enregistrements audio, t\u00e9l\u00e9vis\u00e9s, radiophoniques\u2026 dont certains in\u00e9dits. Quel tr\u00e9sor ! Quel pr\u00e9sent fait au public !<\/strong> Cette Maison Gainsbourg reste surtout une sublime d\u00e9claration d\u2019amour d\u2019une fille \u00e0 son p\u00e8re. Sign\u00e9e Charlotte for Ever.<\/p>\n

Cet article est \u00e0 retrouver dans Gala N\u00b01580 disponible dans les kiosques ce jeudi 21 septembre 2023.<\/strong><\/p>\n

Cr\u00e9dits photos : PacificPressAgency \/ Bestimage<\/p>\n

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