- Deux adaptations en série de La Guerre des mondes débarquent sur nos écrans, l’une de Canal +, l’autre de la BBC.
- Celle de la BBC se déroule en 1900, dans l’Angleterre édouardienne tandis que la proposition de Canal + se passe dans l’Europe contemporaine.
- Pourquoi reprendre un classique de la fin du 19e siècle quand notre époque recèle déjà des trésors d’inspiration pour la science-fiction ?
Cet automne, le petit écran est obsédé par les invasions extraterrestres. Deux nouvelles séries adaptées de La Guerre des mondes, le roman culte signé H. G. Wells s’apprêtent à débarquer sur nos écrans. La première, créée par Howard Overman (Misfits), arrive ce lundi à 21 heures sur
Canal + avec Gabriel Byrne, Elizabeth McGovern (Downton Abbey) et Léa Drucker en tête d’affiche. La seconde, créée par Peter Harness (McMafia), portée par Eleanor Tomlinson (Poldark) et Rafe Spall, est une mini-série en trois épisodes proposée par la
BBC (qui n’a pas encore de date).
Si les difficultés de notre époque sont, malheureusement, une source inépuisable d’inspiration pour la science-fiction (Black Mirror, Westworld, Years and Years), pourquoi reprendre un classique de la littérature de la fin du 19e siècle aujourd’hui ? Certes, à l’ère de la Peak TV (l’accroissement exponentiel de l’offre de séries), il est plus facile de monter un projet sur un « grand titre », selon Howard Overman, comme The Man With The High Castle ou La Guerre des mondes, mais ce n’est pas la seule raison.
L’invasion, une question intemporelle
« Le livre de H. G. Wells est brillant parce qu’il pose de grandes questions : Qu’est-ce que cela signifie d’être vivant ? Quel est cet élan vital qui nous pousse à affronter une situation désespérée », estime Gabriel Byrne. La Guerre des mondes explore la peur d’être anéanti par quelque chose qui vient d’ailleurs et contre lequel on ne peut rien. L’invasion est une question intemporelle. La preuve.
Steven Spielberg a réalisé un film très actuel au moment de sa sortie, en 2005. « Avec sa version de La Guerre des mondes, le cinéaste a fait une proposition totalement inédite qui faisait écho au 11-Septembre et au terrorisme », pointe Frank Lafond, auteur du Dictionnaire du cinéma fantastique et de science-fiction.
Et l’interprétation de Canal + semble à nouveau plus actuelle que jamais. « Je voulais faire une adaptation moderne du roman, pas une adaptation littérale de ce classique », confirme Howard Overman dont l’œuvre pose une question centrale : « Comment des gars comme nous, pas entraînés, réagiraient si le monde était envahi par des extraterrestres ». La série en profite pour explorer des problématiques très contemporaines : la fracture sociale, l’individualisme, l’urgence climatique…
« En écrivant ce livre, H. G. Wells pensait au colonialisme de son époque qui ravageait l’Afrique, explique l’écrivain de science-fiction Jean-Pierre Andrevon. Ça peut être la peur de l’immigration, les changements climatiques, il y a toujours cette peur liée à la fin du monde ». A une époque où les bouleversements environnementaux mettent en péril la planète, il n’est pas difficile d’apporter un regard neuf à cette angoisse. « La catastrophe qui nous menace actuellement implique tous les aspects de notre vie : notre façon de communiquer, de nous informer et de gérer l’intelligence artificielle », commente Gabriel Byrne.
Des angoisses contemporaines
Notre société individualiste, plongée dans une crise migratoire sans précédent et rongées par les divisions, redeviendrait-elle solidaire confrontée à une menace venue d’ailleurs ? « Que se passerait-il face à un ennemi commun qui nous mettrait tous sur le même plan : les réfugiés, les classes aisées… ? », s’interroge la comédienne Elizabeth McGovern. « La question de la différence dans un monde post-Brexit est très pertinente, abonde Howard Overman. La série va progressivement faire apparaître l’idée que nous ne sommes pas si différents des aliens ».
La fin du monde, la crise des réfugiés, les nouvelles technologies, la xénophobie, autant de thèmes qui résonnent avec notre époque. Si de son côté, la série de la BBC, qui se déroule en 1900, dans l’Angleterre édouardienne, semble plus fidèle à l’œuvre originale, elle n’aura pas de mal à faire écho à des peurs encore bien présentes. En somme, « il faut avant tout que ce soit un spectacle », insiste le célèbre auteur Jean-Pierre Andrevon. Même en restant collé à la trame d’origine -des extraterrestre, la menace de la fin du monde-, cela ne devrait pas être trop difficile.
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