Épisiotomie : "J’ai été mutilée alors que je n’avais rien demandé"

L’accouchement de Jessica tourne au calvaire lorsqu’elle apprend qu’on pratique sur elle une épisiotomie, sans même lui avoir demandé son avis. Un épisode douloureux qui a laissé à la jeune maman des cicatrices physiques et émotionnelles. Témoignage.

Novembre 2016, Jessica, journaliste et blogueuse est sur le point d’accoucher de son premier enfant. La jeune femme, âgée de 30 ans, se rend au centre hospitalier dans lequel elle est suivie à Monaco. Elle arrive à 22h, pour repartir aussitôt avant de revenir finalement en pleine nuit. Au cours de la journée on lui fait une péridurale et on lui conseille d’arpenter les couloirs pour déclencher l’accouchement plus rapidement. 

« Au moment où l’on me recoud, on me fait, soi-disant, une anesthésie, mais je ressens tout »

Un accouchement qui ne se déroule pas comme prévu dès le début : « On m’a administré des produits pour l’accélérer alors que je ne voulais pas », explique-t-elle. Les heures passent, l’accouchement se déroule plus ou moins bien.

Elle donne naissance à un beau petit garçon de 3,6kg. Mais le bonheur est de courte durée : elle entend alors la sage-femme lui dire qu’elle va être « recousue ». Jessica apprend subitement qu’elle vient de subir une épisiotomie sans que personne ne lui demande son consentement. 

« C’était la surprise. Au moment où l’on me recoud, on me fait, soi-disant, une anesthésie, mais je ressentais absolument tout ». La sage-femme lui répond alors que la douleur est « dans sa tête » et continue de lui faire subir un calvaire en s’y reprenant à trois fois pour lui faire les points de suture.

Pourquoi a-t-elle subi une épisiotomie ? « Je ne sais pas, on ne m’a rien dit du tout ». En y repensant, Jessica soupçonne le personnel médical d’avoir voulu « expédier » son accouchement

« Je pense qu’ils voulaient aller vite »

« Le jour où j’ai accouché, toutes les salles étaient prises, il y a avait beaucoup d’accouchements, ils étaient débordés et n’avaient pas assez de places pour les mamans. Je pense qu’ils voulaient aller vite. Ils passaient d’une chambre à l’autre et je pense que c’était pour leur faire gagner du temps. »

Le lendemain matin, Jessica se plaint à la sage-femme de douleurs et lui indique qu’elle ne peut même pas poser un pied à terre :

Je souffrais le martyr.

Encore une fois, la sage-femme lui rétorque que c’est « normal » puisqu’elle a subi une épisiotomie. Sa parole est à nouveau remise en cause et non prise en compte. Après trois jours de souffrance, elle est finalement examinée. Résultat : la jeune femme souffre d’un œdème.

« Je suis partie de l’hôpital en oubliant mes affaires »

Au moment de repartir chez elle, personne ne lui dit comment prendre soin de sa cicatrice. Les mois suivants, elle est tellement traumatisée qu’elle ne veut pas faire la visite post-accouchement prévue 8 semaines plus tard. « J’étais tellement dégoutée de cette expérience, je ne voulais même plus y retourner. J’avais besoin de digérer tout ça avant. Je suis même partie de l’hôpital en oubliant des affaires. »

J’ai vécu cet acte d’une façon très violente. C’était un vrai traumatisme.

Un épisode encore douloureux, qui n’a pas laissé que des cicatrices physiques : « Cela fait 4 mois que j’ai accouché et je commence à peine à ne pas pleurer quand j’y pense car pour moi ça a été violent de découvrir ce qu’on m’avait fait et de devoir supporter la douleur sans être écoutée. »

J’en arrive presque à me dire que je ne suis pas sûre d’en faire un deuxième enfant un jour, alors que nous étions partis pour.

Heureusement, la jeune maman a pu compter sur le solide soutien de son compagnon, lui aussi choqué par la manière dont elle a été traitée. Car l’épisiotomie peut aussi remettre en question la vie de couple : « La première fois que nous avons voulu avoir un rapport après l’accouchement, j’avais peur de souffrir. »

Savoir que l’on a le droit de dire « non »

Ce que Jessica reproche le plus au corps médical ? Ne pas avoir été informée, mais surtout, que le corps médical ne lui ai pas demandé son accord pour pratiquer l’épisiotomie.

« Lors des cours de préparation à l’accouchement, la sage-femme avait abordé le sujet sans non plus vraiment rentrer dans les détails et surtout, sans nous dire quelles pouvaient être les conséquences de cet acte. De mon côté je m’étais renseignée en regardant un petit peu sur Internet, pour savoir de quoi il s’agissait, si on pouvait refuser, s’il fallait forcément accepter. Je ne savais pas que la question du consentement devait être posée. Du coup c’était un double choc quand je l’ai appris. Pour le coup j’ai vraiment eu l’impression d’avoir été prise pour une imbécile. On m’a mutilé alors que je n’avais rien demandé. »

Aujourd’hui, Jessica parle de son expérience autour d’elle : « J’en parle à mes amies qui n’ont pas encore eu d’enfants pour les mettre en garde. Le fait de discuter avec celles qui en ont eu elles se sont elles aussi confiées en disant qu’elles avaient vécu la même expérience. Les femmes doivent vraiment se renseigner sur ce sujet et savoir que l’on a le droit de dire non, que l’on ne la veut pas et que l’on a le droit de refuser. On doit insister sur le fait que l’on doit nous demander pour ne pas être surprise.
Nous ne sommes pas des cobayes, des bouts de viande ou des corps qui passent, il y a des personnes derrière. »

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